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Robert
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 Article publié le 14 mai 2023.

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Sur la corne lunaire se niche un oiseau qui râle dans le vent carnassier des nuages, …

Gilbert Bourson, Sur la corniche un oiseau pâle

*

Le dictionnaire Robert prend des airs de Sainte Nitouche.

J’y plonge mes mains grasses, j’y empoigne à pleines brassées des perles fines, des diamants, des rubis et des saphirs ; je n’omets pas quelques alexandrites venues d’une terre maudite et je pleure, je pleure sur les mots morts sans couronne de fleurs, sans tambour ni trompette, sans rien du tout ; de rage, je les secoue comme prunier en fleurs, je les insulte copieusement, je les somme de se réveiller, là, en plein cauchemar, sous la pluie de bombes qui m’assaille. Un fier guerrier Masaï passe par là, n’y comprend que couic, sonne la retraite des hautes herbes, et me voilà tout retourné, crachant du feu, allongé sur un parterre d’asphodèles.

Le râle carnassier des images.

Cette prose étourdissante relève le défi de mots trop tôt endormis dans des proses vingtièmesques trop tôt abouties que personne ou presque ne se souvient d’avoir lues, tant elles font bonnes figures dans un patrimoine commun tellement gigantesque qu’il défie l’imagination des plus grands esprits de notre siècle, auquel nous appartenons si peu. L’heure n’est-elle pas à la simplicité des roulis et des tangages nauséeux de quelques barcasses qui mouillent dans les pores de nos porcs. Circé serait-elle passée par là ?

Gargantua s’éveille, se gratte le dos contre la colline la plus proche et s’approche doucement du berceau : y vagit un bébé fort dodu qui grossit à vue d’œil, il sent la naphtaline, pas encore inventée de son temps, certes, mais tout de même ; il ressort de cette scène touchante que le bébé dodu, mafflu et fessu en diable n’est autre que la réincarnation vagissante d’André Breton que Gargantua ne peut avoir jadis connu, et pour cause. Mais où va le temps, je vous le demande ! Robert n’en peut mais, se contorsionne, se répand en excuses malsonnantes, marche et trébuche sur sa propre langue et se casse la gueule.

Tandis que les bourses de Bourson enflent au soleil de ses gesticulations verbales qui annoncent des éclipses de soleil, se déverse par les fenêtres roses des lilas en fleurs un bruit de casseroles trouées piquées de mille petits pépins de grenade. Boum, boum !

Ça fuse, explose, infuse de partout ! Voilà ce qui arrive, lorsqu’on verse du café dans une théière ! Bourson ne se démonte pas une seule seconde : pas question pour lui et ses semblables de jouer au poète défroqué. Tous et toutes, dans les nuées, se serrent la ceinture, à mesure que les mots se font de plus en plus nombreux. Ils cueillent les mots rares comme on cueille les mangues.

Ce faisant, Ejaculator n’a pas tort de se poser mille questions qui gesticulent dans ses bourses. C’est fort douloureux, d’où le regard suppliant d’Ejaculator qui brille dans les yeux de Bourson.

Bourson accourt, lui presse le groin puis la bite : en sort un jus noirâtre à peine plus ragoûtant que du jus de chaussettes trempé dans du miel. Ah quelle mêlasse ! Tué dans l’œuf, Ejaculator se voit condamné à l’éternel silence des cimes, car, entre-temps, Bourson a pris soin de pendre aux branches mortes d’un vieux frêne les bijoux de famille d’Ejaculator. Paix à ses armes ! Et Sésame aussitôt accourt pour n’en faire qu’une bouchée.

Tué dans l’œuf ! Mort-né ! Les œufs sont si prévisibles, mais qui s’en soucie ? Et les chats jamais ne disent merci.

Aux layons, trop fins et rectilignes à mon goût, je préfère la sauce évasive des venelles de mon pays par où caracolent quelques belles de nuit.

Ainsi marche l’odeur puissante des bois jusque sous les aisselles des belles Naïades entrevues à la fontaine de mon village renaissant. Le lavoir y fête ses Saturnales. Une pléiade de naïades nues y branle en cadence le vit des eaux glacées. L’une d’elle suce langoureusement un glaçon qu’elle a détaché délicatement de la gouttière.

Bourson se renfrogne, grogne du groin et lance à qui veut l’entendre sa prose dégingandée, là, au beau milieu d’un champ de coquelicots. Aujourd’hui, on massacre la couleur rouge. Demain, ce sera le tour au bleu du ciel, ce grand niais aux oreilles décollés, puis aux nuages blancs ou gris qui ne nous ensommeillent que trop.

Vienne le temps béni des pluies fines ! Roberte caresse ses seins vermeils et râle au vent d’automne.

 

Jean-Michel Guyot

11 mai 2023

 

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