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Pute finale - roman (Mayeul Tur)
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 Article publié le 30 avril 2023.

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Pute finale - de Mayeul Tur - chez Les éditions Sans Pitié - 2023


Roman « où il est question de guerre des races, de guerre des sexes, de guerre du genre, d’islamisme, joyeux personnages du monde tel qu’il va. » Le ton est donné, à la manière des joyeuses récréations d’antan. Mais qu’on aille pas trop vite en besogne : ce livre est avant tout un roman. Un vrai. Avec tout ce qu’il faut pour accrocher le lecteur, au niveau du style, de la narration, des péripéties et autres dramaturgies. J’en veux pour preuve son introduction, façon comédie : pour ne pas manquer à la règle du genre, le narrateur se trouve d’emblée emberlificoté dans une situation dont il est impossible de dénouer les fils. Mais c’est à la fois un tissu intellectuel et narratif qui se présente désormais à l’esprit du lecteur et de son nez, façon Randal.

Pas difficile, en ouvrant sa fenêtre ou sa porte, selon ce qu’on désire en faire, de reconnaître que le monde actuel, comme il va, ne va pas. Ou alors il ne va nulle part. Chacun s’accorde à le percevoir tel : un monde conçu pour enfanter non point philosophie et poésie, comme il sied en esprit, mais ce qu’il convient d’appeler des « pensées déviantes ». On entre là aussi sec dans le vocabulaire des luttes contemporaines, ni sociales ni politiques, mais carrément morales.

Car en ce monde occidental, comme dans les autres d’ailleurs, la dictature de la pensée est installée pour imposer des règles de comportement et d’expression. Pourquoi le nier ? Le narrateur s’en explique fort bien : « Au mieux, c’que tu vois tu peux le chuchoter en privé, avec des proches, là tu peux l’dire c’que tu vois, sinon il faut prendre un pseudo, faire passer la vérité sous le manteau, l’évidence en samizdat, t’lancer dans la contrebande de truismes. »

Et bien malgré cette prudente et judicieuse précaution, notre Benjamin, journaliste de profession, se retrouve exactement dans la situation que sa sagesse était censée lui épargner : le processus est ici décrit avec un rare sens de la narration. Ainsi, Benjamin ne dit jamais « monsieur » ni « madame », il ne dit rien et croit s’en tirer sans rien devoir à l’idéologie du Genre. Pourtant, ce biaisement patient devient suspect, car en face on n’est pas si stupide que ça : et, par un imbroglio digne d’un vaudeville des temps passés, le journaliste en question se retrouve à la porte, celle par laquelle il est entré et qui, la preuve en est, sert aussi à sortir. Et voilà le premier acte joué, sur l’air de la guerre des sexes… et de la Loi en vigueur en ce pays.

À ce propos, n’importe qui au moins un peu doué de bon sens sait, pertinemment, que des sexes, il y en a deux : le sadinet et le braquemart, l’un dans l’autre. L’enfant que nous avons été a beau chercher des fois voir s’il y en a pas un troisième, il n’en trouve pas, hormis quelques monstruosités qui appartiennent à la pratique du musée. Et c’est comme ça même chez les bêtes : un cheval est un cheval et une jument est une jument, même si des fois le cheval me regarde d’un drôle d’air, celui-ci n’ayant rien à voir avec la théorie des genres, mais avec la nature des orientations sexuelles, dignes d’intérêt celles-là. ¡Y basta !

Pourtant, le troisième sexe existe. Mais il n’existe pas physiquement. Il existe au-delà de la nature raisonnablement admise. Voilà comment on fait de la métaphysique sans le savoir. Il convient donc d’admettre que ce sexe, s’il en est, côtoie des choses aussi incertaines, mais prégnantes, que Dieu, les morts-vivants, les extraterrestres et autres possibilités dont il est impossible de mesurer la probabilité. C’est ainsi que la guerre des sexes relève du même ambitus que la religion, la magie et autres pouvoirs extra-sensoriels. Autrement dit, un domaine où l’esprit prend le risque de s’égarer, ce qui ne regarderait que soi-même si des bizarres idées n’étaient pas en train de nous noyer dans ce qui n’est plus « je » mais les « autres ». Encore une manière de déviance…

Le narrateur de cette histoire s’y prend tellement bien, à la raconter et à lui donner du style (encore un as de l’écriture), qu’on finit par y croire. D’où le terme « déviance » dont il prévient soigneusement le lecteur. Et il en est ainsi des autres guerres évoquées presque systématiquement dans ce roman, y compris l’islamisme qui semble, si l’on en croit Benjamin, changer la Gauche en Droite et la Droite en Raison. Mayeul Tur, l’auteur de cette fresque digne du siècle d’Or, nous met le nez dans la mouise et je vous prie de croire que ça ne sent pas bon, mais alors pas du tout. Mais pas façon Mad Max, que ça sent le pétrole ; façon que c’est aujourd’hui que ça se passe et que c’est pas sur un écran qu’on est projeté, mais dans le trou. Celui ou celle, l’une ou l’autre, qui ne s’y voit pas a un sérieux problème d’optique ; quant au troisième, je ne sais pas, p’t’ête bien qu’oui p’t’ête bien qu’non, des fois queue… faudra que j’m’agenouille moi aussi, pour méditer ou prier, sans nuances.

Un beau, un vrai roman, facile à lire parce qu’il parle et qu’il faudrait être vraiment sourd pour ne pas entendre ce qu’il dit. Moins facile à comprendre, parce qu’on a beau faire, on est forcément un peu tordu question esprit ; à force de croire, de ne pas croire, d’aimer, de ne pas aimer, de cliquer où il faut et de ne pas s’éteindre aussi facilement qu’un écran…

Roman « ...où naîtront bien des pensées déviantes en un homme. Ne le condamnez pas : ce sont vos filles. » Suivez ce philosophique conseil et plongez-vous dans la Réalité. Elle existe, elle.

 

Les Éditions Sans Pitié, sises au Canada, se présentent comme « maison d’édition spécialisée dans la publication de littérature (roman, essai, poésie, nouvelle et bande dessinée) d’horreur, ordurière, subversive, incorrecte, antisociale et inhumaine. » Si toutes ses publications sont entreprises à la hauteur de l’ouvrage de Mayeul Tur, il faut acheter tous ses livres !

« Pute finale » se trouve ici :

https://editionssp.ca/produit/pute-finale/

Quant à Mayeul Tur, je ne sais pas qui c’est et je ne m’en fous pas, parce que c’est un sacré écrivain.

Patrick Cintas.

 

 

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